Depuis quelques mois déjà, nous avons vu nos fils d’actualités remplies de dénonciation d’inconduite à caractère sexuel ou d’abus de pouvoir. Plusieurs dénonciations publiques faites aux États-Unis ont déclenché une série de dénonciations autant au Québec, qu’en Europe. Cette vague mondiale de partage sur les réseaux sociaux, tel que Facebook, Twitters et autres a déclenché une prise de conscience, quant à l’importance de briser le silence et d’arrêter de fermer les yeux. Cette prise de conscience doit impérativement être présente en milieux de travail.
La Loi sur les normes du travail est claire à l’effet que «tout salarié a droit à un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique»[1]. Par conséquent, les employeurs se doivent d’être proactifs dans le respect des normes établies par la Loi. La Loi leur impose deux obligations, à savoir :
- L’employeur doit prendre tous les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique; Et
- L’employeur doit faire cesser la conduite, lorsqu’elle est portée à sa connaissance.
Qu’en est-il réellement de cette notion de harcèlement psychologique?
Le harcèlement
Qu’est-ce que le harcèlement psychologique? La Loi mentionne que :
«Pour l’application de la présente loi, on entend par « harcèlement psychologique » une conduite vexatoire se manifestant soit par des comportements, des paroles, des actes ou des gestes répétés, qui sont hostiles ou non désirés, laquelle porte atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychologique ou physique du salarié et qui entraîne, pour celui-ci, un milieu de travail néfaste.
Une seule conduite grave peut aussi constituer du harcèlement psychologique si elle porte une telle atteinte et produit un effet nocif continu pour le salarié.»
Cette définition permet d’inclure autant la conduite répétée, que la conduite unique, mais ayant un caractère grave, ce qui inclut le harcèlement à caractère sexuel. Il est important d’analyser le(s) geste(s) et/ou le(s) parole(s), en fonction de la victime présumée, et ce, d’un point de vue objectif. Donc, est-ce qu’une personne raisonnable placée dans la même situation serait arrivée à la même conclusion?
La prévention
La Loi sur les normes du travail stipule clairement que l’employeur doit prendre les moyens raisonnables afin de prévenir le harcèlement. Cependant, la Loi demeure silencieuse quant à la manière dont l’employeur doit s’y prendre.
L’employeur peut introduire dans son entreprise des méthodes en vue de prévenir le harcèlement psychologique. Notamment :
- Rédiger une politique sur le harcèlement psychologique. Cette politique aura pour but :
- D’établir les objectifs clairs de la direction face au harcèlement psychologique;
- De définir ce que constituent le harcèlement psychologique et les comportements interdits pour l’entreprise
- Informer les travailleurs d’un mécanisme de dénonciation à l’interne;
- Mettre sur pied un mécanisme de dénonciation à l’interne. Cette personne doit être une personne ressource pour les employés, puisqu’elle traitera les plaintes reçues;
- Mettre sur pied un comité d’enquête;
- Mettre sur pied un mécanisme de soutien aux travailleurs ayant subi du harcèlement psychologique au sein de l’entreprise;
- Établir des mesures disciplinaires ou d’autres mesures;
Le harceleur
L’obligation de l’employeur va au-delà de protéger ses travailleurs contre le harcèlement fait à l’interne par d’autres travailleurs. En effet, l’obligation de l’employeur va même jusqu’à la protection de ses travailleurs contre les tiers. Ce tiers peut donc, être un client ou un fournisseur.
Dans la mesure où l’employeur est mis au courant de la situation, il sera tenu d’intervenir rapidement.
Milieu de travail
Il est important de savoir que l’application de la règle d’« un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique » ne prend pas fin lorsque le travailleur sort de l’immeuble où il travaille. En fait, l’obligation de l’employeur va bien au-delà des quatre murs de son établissement. En effet, ce dernier a aussi l’obligation de s’assurer que toutes les activités organisées pour les travailleurs, tels une formation, un rassemblement, une activité de reconnaissance, et les «Party» de Noël, soient faites dans le respect et soient exemptes de harcèlement.
Enfin, malgré que la Loi sur les normes du travail reste silencieuse relativement à ses attentes face aux employeurs, il n’en demeure pas moins que ce dernier doit prendre tout les moyens raisonnables pour prévenir le harcèlement psychologique et le corriger s’il est présent au sein de son entreprise.
À aucun moment, l’employeur ne pourra soulever son ignorance de l’existence d’une situation, afin d’être exonéré de son obligation de protection envers ses travailleurs. Le phénomène social que nous avons connu depuis octobre 2017, a sa raison d’être, et il est du devoir de chacun de valoriser un milieu de travail exempt de harcèlement, sous quelques formes que ce soit, sans se cacher derrière l’absence de plainte de la victime.
[1] Article 81.19 Loi sur les normes du travail;