La Cour d’appel a récemment rendu une décision à ce sujet dans l’affaire Ville de Dorval c. Centres de la jeunesse et de la famille Batshaw, 2012 QCCA 1493 1.
Les faits
L’intimée exploite un centre offrant des services de réadaptation en mode de garde ouverte aux adolescents en difficulté. Cet immeuble se situe dans une zone à l’intérieur de laquelle le règlement de zonage autorise uniquement les usages relevant de la classe « communautaire institutionnelle et administrative (p1) », ce qui inclut les centres d’accueil; les parties s’entendent sur la conformité de l’usage exercé.
Le litige survient au moment du dépôt par l’intimée d’une demande de permis. En effet, elle envisage d’agrandir son centre et d’y réorganiser les activités de façon à ce qu’il n’y subsiste, à terme, que des unités de garde fermée. Or, quelques semaines plus tôt, un conseiller municipal a donné un avis de motion en vue d’une modification réglementaire ayant pour effet d’autoriser l’usage « établissement de détention, carcéral ou de garde fermée » dans trois zones précises, lesquelles n’incluent pas celle où se trouve l’immeuble.
La Ville refuse donc de délivrer le permis au motif que l’avis de motion a enclenché un effet de gel et que la nouvelle réglementation ne permettra pas à l’intimée d’aller de l’avant avec son projet. Quant à cette dernière, elle ne se considère pas concernée par la modification puisqu’elle juge que l’usage projeté fait partie de la classe d’usage « p1 ».
Il y a lieu de noter que le libellé de l’avis de motion, contrairement à celui du projet de règlement ayant été déposé simultanément, n’indiquait pas expressément que l’usage précité était prohibé dans toutes autres zones que celles énumérées.
Le droit
La Cour d’appel conclut que l’avis de motion n’a pu produire l’effet de gel prévu par l’article 114 L.A.U., et ce, en raison de son imprécision.
Un tel avis doit, selon la Cour, indiquer expressément et avec précision tant la nature de la modification réglementaire projetée que les zones affectées. Ce principe est particulièrement vrai en matière de zonage, considérant les conséquences significatives que peut entraîner une modification à la réglementation.
En l’espèce, l’avis de motion est insuffisamment précis puisque la Ville ne pouvait pas présumer que le fait d’autoriser un usage dans certaines zones impliquait nécessairement qu’il se trouverait prohibé dans toutes autres zones, incluant celles où il pouvait jusque-là être autorisé.
Par conséquent, puisque de l’avis de la Cour l’usage projeté est conforme à la réglementation telle qu’elle était en vigueur au moment du dépôt de la demande, la Ville doit émettre le permis demandé.
L’exécution de cette décision a été suspendue jusqu’à ce que la Cour suprême ait rendu un jugement final dans le litige (2012 QCCA 1562).