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Affaires commerciales, transactionnelles et fiscales

Droit des sociétés et droit commercial

La convention (unanime) entre actionnaires : une convention loin de faire l’unanimité

21 septembre 2023

De plus en plus de jeunes entrepreneurs aux idées florissantes se lancent en affaires. Ils sont ambitieux, s’entendent bien et sont prêts à développer leur société, mais ont malheureusement peu de moyens financiers. Ils considèrent souvent que conclure une convention entre actionnaires est couteux, peu utile et ne constitue pas une priorité pour le développement de leur société. C’est un point de vue tout à fait compréhensible. Toutefois, celui-ci est valable tant et aussi longtemps que les jeunes actionnaires sont en harmonie dans la gestion des affaires de la société. En effet, bien que la conclusion d’une telle convention puisse aux premiers abords paraître superflue, celle-ci revêt un intérêt non négligeable (1) en ce qu’elle constitue une véritable garantie au bien-être de votre société (2) dès lors que celle-ci ait été consciencieusement rédigée (3).

(1) Intérêt

La convention entre actionnaires vise principalement à établir les droits et obligations de chacun eu égard, d’une part, aux actions détenues directement ou indirectement par les actionnaires, et d’autre part, à l’organisation et la conduite des affaires de la société. À cet égard, dès lors que les pouvoirs des administrateurs y sont, en tout ou en partie, attribués aux actionnaires, la convention se qualifie « d’unanime » et son existence doit être déclarée auprès du Registraire des entreprises du Québec1. La loi prévoit par exemple que toute déclaration de dividende est du ressort du conseil d’administration2. Or, par le biais d’une convention unanime entre actionnaires, ces derniers pourraient décider de s’attribuer un tel pouvoir afin qu’aucun dividende ne puisse être versé sans l’autorisation préalable de tout ou d’une partie des actionnaires. En effet, il arrive que les actionnaires ne désirent pas être administrateurs tout en se réservant le droit de participer à certaines décisions qu’ils jugent cruciales.

De plus, la convention est un instrument visant à prévenir tout conflit entre les actionnaires, de sorte que la survenance de celui-ci ne constitue pas un frein aux activités de la société. Ainsi, il pourrait être convenu de contraindre un actionnaire à vendre ses actions en cas de désaccord irréconciliable entre les administrateurs ou les actionnaires, entraînant de ce fait la démission de l’actionnaire-vendeur à titre d’administrateur. Pour être efficace, la convention doit alors détailler les règles visant à solutionner un tel conflit, et à défaut, les modalités de vente desdites actions.

Peu importe le nombre d’actionnaires, une telle convention demeure précieuse. En effet, dans le cas d’une société détenue à parts égales par deux actionnaires, l’un pourrait décider de vendre la totalité de ses actions à un tiers ayant une vision différente de la conduite des affaires de la société, ou pire, à un compétiteur, auquel cas la gestion de celle-ci deviendrait impossible. De même, lorsque la société est détenue par un plus large éventail d’actionnaires, une convention demeure pertinente, car elle permet d’encadrer les droits et obligations de chacun. Ainsi, un droit d’entraînement pourrait y être prévu afin d’imposer à tout actionnaire minoritaire la vente de ses actions dans l’hypothèse où une majorité désirerait vendre à un acheteur prêt à acquérir l’intégralité des actions émises.

(2) Garantie

Dès la création de leur société, les actionnaires se concentrent sur le bien-être et le développement de ses activités. Pourtant, nombreux sont ceux écartant la rédaction d’une convention entre actionnaires, celle-ci leur apparaissant pour le moment couteuse et inutile. Or, c’est justement quand elle deviendra utile qu’il sera trop tard pour la rédiger. En effet, la convention vise à anticiper tout potentiel conflit afin de le prévenir, ou à défaut, de le résoudre le plus rapidement possible. Cela pourrait notamment permettre d’éviter un blocage dans la gestion de la société suite au désaccord des actionnaires, lequel pourrait mener à un recours judiciaire ou encore à la dissolution de la société. Il faut ainsi profiter des bonnes relations entre les actionnaires et de leur volonté d’agir pour le bien-être de la société afin de les inviter à négocier de bonne foi et ensemble la rédaction d’une convention entre actionnaires.

La convention constitue donc un investissement sur le long terme et peut être assimilée à une assurance visant à prévoir différentes situations pouvant mettre en péril les affaires de la société. Il est certain que personne ne se réjouit d’avoir à payer sa prime d’assurance, mais dès lors qu’un problème survient, tout le monde est soulagé d’être couvert.

(3) Rédaction

Bien que toute économie puisse être bonne à prendre, il est fortement déconseillé de rédiger une telle convention soi-même. En effet, l’utilisation d’un modèle ne vous garantit en rien qu’il réponde à vos besoins. Certes les professionnels ont également recours à des précédents qu’ils ont eux-mêmes développés et affinés au cours des années. De surcroît, leur expérience leur permettra d’adapter la convention aux spécificités de l’actionnariat et des activités de la société. De même, ceux-ci, de par leur expérience, sauront vous ouvrir les yeux sur les situations problématiques qui peuvent survenir et vous aideront ainsi à mieux vous préparer.

Enfin, rappelons que l’un des objectifs de la convention étant de régler toute situation prévue rapidement et à moindres frais, une convention mal rédigée ne permettra pas d’atteindre cette finalité. De même, il est important de faire ajuster ce document lors de tout changement important au sein de l’actionnariat de la société. La convention entre actionnaires doit donc être perçue comme un outil clé dans la gestion de la société et ne devrait pas être négligée par les actionnaires.

N’hésitez pas à communiquer avec nous pour toute question ou accompagnement dans la rédaction de votre convention.


1 Loi sur la publicité légale des entreprises, RLRQ, c. P-44.1, art. 35(6).

2 Loi sur les sociétés par actions, RLRQ, c. S-31.1, art. 118(6) ; Loi canadienne sur les sociétés par actions, LRC 1985, c. C-44, art. 115(3)(d).