Le 10 juin dernier, le législateur sanctionnait l’entrée en vigueur de la Loi modifiant diverses dispositions législatives principalement en matière d’habitation. Cette loi vise à octroyer de nouveaux pouvoirs aux villes et aux municipalités du Québec quant à l’acquisition prioritaire d’immeubles et de terrains. Avec l’ajout des articles 572.0.1 et suivants à la Loi sur les cités et villes (« LCV ») et des articles 1104.1.1 et suivants au Code municipal du Québec (« Code »), les municipalités pourront désormais se prévaloir d’un droit de préemption sur un immeuble ou un terrain sous certaines conditions.
Portée du droit de préemption
Suivant les dispositions habilitantes intégrées à la LCV et au Code, les municipalités désirant se prévaloir d’un droit de préemption devront, dans un premier temps, adopter un règlement balisant le territoire où il sera possible d’exercer un tel droit ainsi que les fins municipales auxquelles des immeubles pourront être acquis1. Exclusion faite des immeubles qui sont la propriété d’un organisme public au sens de la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, le droit de préemption pourra être exercé sur l’ensemble des immeubles du territoire de la municipalité, sous réserve du droit de préemption prévu à l’article 56 de la Loi sur le patrimoine culturel et de celui prévu à l’article 68.3 de la Loi sur la Société d’habitation du Québec.2
Avis d’assujettissement
Une fois le règlement adopté, la municipalité devra se conformer aux formalités de publication prévues par la loi. Plus spécifiquement, elle devra notifier au propriétaire de l’immeuble un avis d’assujettissement identifiant clairement l’immeuble visé et décrivant les fins auxquelles il pourra être acquis en priorité3. Une fois la notification complétée, le droit de préemption ne prendra effet qu’à compter de son inscription au registre foncier. Il sera alors valide pour la période indiquée dans l’avis, laquelle ne peut pas excéder 10 ans.
Exercice du droit de préemption
Une fois le droit de préemption en vigueur, le propriétaire visé par l’avis d’assujettissement ne pourra, sous peine de nullité, aliéner son immeuble sans d’abord notifier la municipalité de son intention. Cet avis devra indiquer le prix et les conditions de l’aliénation projetée ainsi que le nom de la personne qui envisage d’acquérir l’immeuble4. Une fois notifiée, la municipalité disposera d’un délai de 60 jours afin d’informer le propriétaire de son intention d’exercer son droit de préemption à l’égard de l’immeuble. La municipalité devra alors, dans les 60 jours suivant la notification de l’avis de son intention d’acquérir l’immeuble, en acquitter le prix5. La municipalité devra également, le cas échéant, dédommager la personne qui envisageait d’acquérir l’immeuble pour les dépenses raisonnables qu’elle a engagées dans le cadre de la négociation du prix et des conditions de l’aliénation projetée6.
Ce vent de changement dans le monde de l’habitation représente un gain important pour le pouvoir municipal et, conséquemment, augmente la marge de manœuvre dont les municipalités disposent afin de s’attaquer aux problèmes d’accès au logement. Chose certaine, il sera intéressant d’observer les impacts de l’application de la nouvelle Loi 37 sur le marché immobilier.