La Cour d’appel a confirmé, le 9 janvier dernier[1], l’interprétation de la Cour supérieure dans l’affaire Ville de Rivière-du-Loup c. Procureure générale du Québec[2] à l’effet que les cendres et les matériaux de construction broyés utilisés à titre de matériaux de recouvrement doivent être compris dans le calcul des quantités de matières résiduelles reçues.
Dans cette affaire, la Ville de Rivière-du-Loup (« Ville ») utilisait ces types de matériaux suivant l’obtention de deux certificats d’autorisation du ministère du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques (« ministère »), conformément à l’article 42 du Règlement sur l’enfouissement et l’incinération de matières résiduelles (RLRQ, c. Q-2, r. 19) (« R.E.I.M.R. »), prévoyant qu’une autorisation est nécessaire pour utiliser un matériau de recouvrement autre qu’une couche de sol.
À la suite de l’avis du ministère à l’effet que les matières résiduelles enfouies à son lieu d’enfouissement technique (« LET »), incluant les matières de recouvrement qu’elle utilisait, excédaient la limite de 50 000 tonnes fixée par l’article 32 du R.E.I.M.R., la Ville avait déposé une demande en jugement déclaratoire afin de faire déclarer le contraire, au motif que les matériaux de recouvrement ne devaient pas être inclus dans le calcul des quantités reçues de matières résiduelles.
L’enjeu du débat était notamment lié au fait que le dépassement du seuil pouvait compromettre l’admissibilité de la Ville au Programme Biogaz, pour certaines années passées, ainsi qu’aux autres programmes établis à la suite de l’entrée en vigueur du Règlement concernant le système de plafonnement et d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre (RLRQ, c. Q-2, r. 46.1).
Selon la Ville, pour qualifier une matière de « matière résiduelle » au sens de l’article 1 (11) de la Loi sur la qualité de l’environnement (RLRQ, c. Q-2) (« Loi »), la fin pour laquelle ladite matière est destinée devait être prise en considération. Ainsi, puisque les résidus provenant du broyage de matériaux de construction et les cendres étaient utilisés par la Ville à titre de matériaux de recouvrement déposés quotidiennement sur les matières résiduelles enfouies, cette dernière estimait qu’ils ne constituaient pas des « matières résiduelles » au sens de la Loi.
Cette prétention était appuyée sur l’interprétation du terme « résidu » que l’on retrouve à la définition de l’article 1 (11) de la Loi, lequel se limitait, selon elle, au résidu ultime, à savoir le résidu sans utilité ni valeur et dont l’objectif est l’élimination.
Or, selon la Cour d’appel, le terme « résidu » n’est « pas tributaire de l’intention de son détenteur de l’abandonner, mais […] renvoie à sa provenance selon qu’il résulte d’un processus de production, de transformation ou d’utilisation ».
La Cour d’appel a donc rejeté l’appel de la Ville, confirmant ainsi la conclusion de la Cour supérieure à l’effet que les matériaux qu’elle utilisait, à titre de matériel de recouvrement, constituaient des « matières résiduelles » au sens de la Loi et devaient, par conséquent, être inclus dans le calcul des matières résiduelles reçues à son LET.
Les exploitants de lieux d’enfouissement technique devront donc considérer cette interprétation de la Cour d’appel dans leur choix de matériaux de recouvrement et, incidemment, dans celui de demander un certificat d’autorisation au ministère afin de pouvoir utiliser un matériau de recouvrement autre qu’une couche de sol.
[1] Ville de Rivière-du-Loup c. Procureure générale du Québec, 2018 QCCA 11
[2] Rivière-du-Loup (Ville de) c. Québec (Procureure générale), 2016 QCCS 3861