La nature des activités d’un employeur, comme la survenance d’incidents malheureux, constituent souvent des impératifs à considérer pour la protection des biens de l’employeur ainsi que des personnes qui circulent au sein de son établissement.
Ainsi, il n’est pas rare de voir, par exemple, dans des magasins à grande surface, dans des corridors d’accès ou encore aux abords de guichets électroniques, des caméras destinées à surveiller des activités se déroulant dans ces lieux.
La surveillance des lieux de travail se heurte toutefois au droit fondamental, contenu à l’article 46 de la Charte des droits et libertés de la personne, à des conditions de travail justes et raisonnables et qui respectent la santé, la sécurité et l’intégrité physique d’un travailleur. Une décision toute récente de monsieur Marc Poulin, arbitre, rendue le 15 juin 2007 dans l’affaire de TCACanada c. Cummins Est du Canada vient réitérer les conditions dans lesquelles il sera possible de réconcilier les droits du travailleur avec l’intérêt légitime de l’employeur de surveiller sa propriété ainsi que les personnes qui y circulent.
Cet arbitre, comme d’ailleurs une abondante jurisprudence arbitrale, précise que la surveillance électronique en milieu de travail ne constitue pas en soi une intrusion dans la vie privée des salariés. En effet, les lieux de travail ne font pas habituellement partie du domaine de la vie privée du travailleur.
Les conditions reconnues par la jurisprudence et appliquées par monsieur Poulin dans la sentence arbitrale mentionnée précédemment pour justifier la
surveillance par caméra sont au nombre de 4.
D’une part, la surveillance doit se fonder sur des motifs réels et sérieux. La survenance d’incidents malheureux, tels que des vols, du sabotage ou du vandalisme peuvent constituer de tels motifs réels et sérieux.
En deuxième lieu, l’employeur doit démontrer que la surveillance par caméra aidera à régler ou éliminer le problème éprouvé. Dans cette perspective, il devra déterminer s’il existe d’autres moyens que la surveillance par caméra. Notons à cet égard qu’au moins 3 arbitres ont reconnu que la loi du silence imposée par les collègues salariés à une enquête menée par l’employeur sur, par exemple, du sabotage ou un vol, pourrait justifier un employeur à utiliser le moyen de la surveillance par caméra. Dans un tel contexte, l’installation d’un système de surveillance par caméra pourrait même avoir un effet dissuasif.
En troisième lieu, l’installation du système de surveillance par caméra doit respecter certaines exigences en termes d’emplacement, du type de caméra utilisé, ainsi que de l’utilisation ultérieure des images captées.
Par exemple, il sera permis à un employeur d’enquêter sur la survenance d’incidents particuliers au moyen des images captées par les caméras de surveillance. Toutefois, il ne lui sera pas permis, en principe, de surveiller la cadence ou la productivité des employés par une consultation continue des images captées par les caméras de surveillance.
Finalement, la surveillance exercée doit porter atteinte le moins possible aux droits d’un salarié d’exercer ses fonctions sans être constamment épié par la caméra.
Dans ce contexte, le choix de l’équipement ainsi que son positionnement peut s’avérer fort important. Même en présence de motifs réels de la part de l’employeur pour imposer une surveillance, le fait de pointer sur un poste de travail en particulier pourrait faire en sorte que l’employeur porte atteinte aux droits d’un salarié d’exercer ses fonctions dans des conditions de travail justes et raisonnables, respectant sa santé, sa sécurité
et son intégrité physique.
N’oublions pas l’adage : une image vaut mille mots !