Plusieurs villes et municipalités ont sur leur territoire un ou des plans d’eau navigables. De nombreux usagers des plans d’eau y naviguent sur de petites embarcations, tels que des canots et des kayaks, mais également sur des embarcations beaucoup plus puissantes qui permettent de tirer une personne sur ski nautique, sur aquaplane ou sur tout autre équipement. La cohabitation entre ces différents types d’embarcation peut être problématique, voire même dangereuse, ou encore avoir pour effet d’accélérer l’érosion des berges et d’altérer la qualité de l’eau. Une solution possible : aménager une bande où la limite de vitesse maximale sera contrôlée à une certaine distance de la rive.
Or, comme les plans d’eau navigables relèvent en principe de la compétence du gouvernement du Canada, il importe de retenir que c’est le Bureau de la sécurité nautique (ci-après le «BSN») de la Sécurité Maritime de Transports Canada qui est chargé d’administrer le processus de demande de modifications de la réglementation fédérale sur les restrictions visant l’utilisation des bâtiments sur les plans d’eau. Nous tenterons de vous exposer sommairement les démarches et procédures applicables afin qu’une administration locale puisse obtenir une modification de la réglementation fédérale sur les restrictions visant l’utilisation des bâtiments sur les plans d’eau.
La loi prévoit trois (3) motifs pouvant justifier une demande d’intervention réglementaire visant à restreindre la navigation : la sécurité, l’intérêt du public et la protection de l’environnement. La démonstration d’un seul de ces motifs suffit à justifier une intervention réglementaire. Pour les fins de notre analyse, nous porterons une attention particulière à une demande fondée sur un motif de sécurité.
Le Guide des administrations locales sur les restrictions à la conduite des bateaux établit que l’un des éléments fondamentaux de la démarche, qui doit être initié dès ses débuts, est la mise en place d’une procédure de consultation. Il est préférable de tenir des consultations avec tous les intervenants dès l’étape de l’identification de la problématique que l’on vise à corriger et que cette consultation ait un caractère continu, en ce sens que les intervenants concernés aient la possibilité de s’exprimer et de faire valoir leur point de vue aux principales étapes du processus. Au niveau de la forme que pourraient prendre ces différentes consultations, il existe de multiples options, lesquelles sont plus amplement décrites au document intitulé «Lignes directrices pour des consultations efficaces sur la réglementation».
Les éléments examinés par le BSN dans l’évaluation d’une demande de modification réglementaire sont les suivants :
- Un problème clairement énoncé;
- L’indication de toutes les causes connues du problème;
- L’examen des solutions de rechange autres que réglementaire et les tentatives de mise en œuvre;
- Description des consultations publiques qui ont été menées;
- Raisons pour lesquelles la réglementation constitue la seule solution possible;
- Étude d’impact et analyse avantages-coûts fondées sur la décision de réglementer;
- Plans d’eau désignés et identifiés en des termes que peuvent facilement comprendre des intervenants;
- Prise en considération des organisations dirigeantes des Premières Nations Inuit et Métis, des communautés, des particuliers détenant un intérêt dans la zone examinée et inclusion de ces groupes et particuliers au processus dès le début;
- Méthodes appropriées en place pour permettre le respect des restrictions réglementaires et possibilité d’assurer la surveillance qui s’impose.
Une des premières étapes du processus consiste en l’énonciation claire du problème ainsi que l’indication de toutes ses causes connues. Tous les intervenants devraient avoir la chance d’exprimer leur vision de la problématique, de ses causes mais aussi de ses solutions possibles. Le document intitulé Évaluation des solutions de rechange à la réglementation permet de connaître de manière plus détaillée les éléments pour ce dernier point. Il est important de noter que l’évaluation des solutions de rechange à la réglementation constitue l’un des principaux motifs justifiant un refus de l’autorité fédérale de réglementer, cet aspect du processus doit donc être traité avec le plus grand soin. À la fin des consultations publiques portant sur l’examen des solutions de rechange, si aucune solution de rechange ne semble solutionner la problématique de façon satisfaisante, alors l’administration locale pourra faire la démonstration que la réglementation constitue la seule solution possible.
L’autorité réglementaire exige une étude d’impact et analyse avantages-coûts. Le Guide de l’analyse avantages-coûts pour les programmes de réglementation mentionne les critères à observer. Il s’agit en quelque sorte de faire un inventaire des coûts qui seront associés à la mise en place et à la mise en application de la nouvelle réglementation. Ensuite, une évaluation sera effectuée basée sur le degré d’acceptation de la solution proposée anticipée dans la communauté, lequel sera élevé ou faible. En fonction de l’estimation des coûts et de ce degré d’acceptation, le projet sera classé comme en étant un de faible coût, de coût intermédiaire ou encore comme étant un projet majeur. Cet exercice doit être répété pour les principales solutions possibles et envisageables, lesquelles devraient normalement inclure des solutions autres qu’une intervention réglementaire. L’autorité réglementaire désire ainsi s’assurer obtenir le meilleur ratio avantages-coûts possible lorsqu’elle évalue la pertinence d’effectuer une intervention réglementaire.
En conclusion, bien que plusieurs documents confectionnés par le BSN décrivent le processus et, plus en détail, ses étapes charnières, de modification de la réglementation fédérale sur les restrictions visant l’utilisation des bâtiments sur les plans d’eau, ce processus revêt une certaine complexité et requiert l’intervention de professionnels méticuleux. Le présent texte se veut un simple aperçu sommaire du processus en question afin de mettre en perspective la somme de travail et les ressources nécessaires afin de bien le compléter.
Cet article a été publié en collaboration avec Me François Guimont, également de Dunton Rainville, dans l’édition Mars-Avril-Mai 2013 du magazine Quorum de la Fédération québécoise des municipalité, Vol. 38 No2 en pages 48 et 49.